Réagissant à l'article des « Echos » faisant état de deux génériqueurs indiens dans la short list des candidats au rachat du leader français des génériques, Biogaran, le ministre de l'industrie Roland Lescure a évoqué la possibilité de s'y opposer par la procédure sur les investissements étrangers.
Le dossier de la vente du champion tricolore des génériques Biogaran pourrait se décanter plus vite que prévu. Réagissant aux informations des « Echos » selon lesquelles deux des quatre candidats au rachat étaient des génériqueurs indiens, le ministre de l'industrie Roland Lescure est finalement monté au front.
Bercy a le pouvoir de faire barrage à un investisseur étranger dans un secteur listé comme stratégique, ce qui est le cas de la santé. Interrogé par « Les Echos » sur sa position de principe, mercredi, le cabinet de Roland Lescure avait indiqué « ne pas commenter mais suivre avec attention ». Jeudi, après parution de l'article des « Echos », Roland Lescure a été interrogé lors d'un déplacement dans la Sarthe pour l'inauguration de l'usine de gants médicaux Manikheir et a eu un ton plus dur, indiquant tenir à « être clair et ferme ».
Procédure de contrôle
Dans cette mise en vente confiée à Lazard, la banque conseil du groupe Servier, actionnaire de Biogaran, l'opération est assez avancée pour que les candidats aient été réduits à une short list de deux investisseurs financiers européens et deux génériqueurs indiens sans que, selon nos informations, l'issue soit jouée. Le ministère reste prudent dans sa formulation mais va visiblement peser sur ladite issue.
« Si un investisseur étranger souhaite acheter Biogaran, nous nous laissons la possibilité d'activer la procédure dite IEF [investissements étrangers en France]. Cette procédure permet de contrôler les investissements réalisés par des entreprises étrangères en France dans des secteurs stratégiques. Dans le cadre de cet examen, nous déterminerons les conditions nécessaires et proportionnées pour assurer notre souveraineté sanitaire », a réagi Roland Lescure.
Biogaran, qui produit 350 millions de boîtes de médicaments par an, et représente à lui seul 32 % du marché français des génériques, n'a pas d'usines en propre. Il produit 50 % de ses médicaments en France (dont l'amoxicilline, l'antibiotique le plus utilisé) et 90 % en Europe, via des contrats avec des sous-traitants locaux, d'une durée n'excédant pas 3 ou 4 ans. Ce qui suscite des craintes de transfert de sa production en cas de rachat par un génériqueur indien. Les génériques représentent 60 % des 450 médicaments essentiels listés par la feuille de route pénurie du ministère de la santé. Sur les 7 génériqueurs présents dans l'Hexagone, Biogaran est le seul acteurs français, et le seul génériqueur à produire en France.
Myriam Chauvot